C’est en se baladant sur le boulevard Carnot vers le grand rond-point Pasteur, que l’on peut apercevoir la statue de la courageuse Louise de Bettignies. Mais pourquoi cette statue, qui est un monument au mort, représente cette femme les yeux vers le ciel ? Et Pourquoi ce soldat lui baise-t’il la main un genou à terre ? Nous allons ainsi découvrir le fabuleux mais non moins tragique destin de la “Jeanne d’Arc du Nord”.
Louise la Lilloise voyageuse
Louise de Bettignies est née en 1880 à St Amand les eaux, dans une famille noble peu aisée malgré leur statut social. Dès son plus jeune âge, elle était décrite comme intelligente et vivace. Peu après ses études secondaires chez les soeurs du Sacré-Coeur sur Valenciennes, Louise partit pour l’Angleterre dans l’Essex puis à Oxford pour poursuivre dans le supérieur. Ce n’est qu’en 1903 qu’elle revint auprès de sa famille pour s’instruire à l’université de Lille. Par la suite, elle dû prendre un emploi. C’est ainsi que la fascinante Louise voyagea en Italie, Pologne et Autriche pour y exercer le métier de préceptrice. Et c’est en 1914 que Louise revint sur Lille…
Alias Alice Dubois
A cette triste époque, Lille était ravagée par les affrontements allemands et plusieurs quartiers furent détruits. Louise prit un poste d'infirmière en octobre 1914 juste avant que la ville soit occupée par les Allemands. S’engageant dans la résistance française, notre compatriote fit un séjour sur Folkestone en Angleterre pour apprendre les principes de l’espionnage. Depuis son domicile lillois rue d’Isly, elle créa le "réseau Ramble" ou "réseau Alice" (son propre réseau d’espionnage qui comptait 80 personnes dans le nord de la France et qui faisait passer des messages codés aux forces alliées britanniques) et sauva ainsi un millier de soldats britanniques en 9 mois. Mais elle ne put empêcher le désastre de la bataille de Verdun, malgré qu’elle eût prévenu le commandement français...
Le destin tragique d’une héroïne déterminée
Capturée près de Tournai en octobre 1915, elle fut jetée en prison dans la forteresse de Siegburg en Allemagne. Tenant tête à ses geôliers, Louise fit plusieurs allers- retours en cellule d’isolement, se refusant à travailler pour l'ennemi… Malheureusement l’humidité et l’insalubrité de la cellule précipitèrent son destin : amenée bien trop tard à l'hôpital pour une pleurésie, elle décède en Allemagne en 1918 à seulement 38 ans.
L’hommage à cette femme remplie de courage ne s’arrête pas à cette statue. En effet, en avançant dans le quartier du Vieux-Lille pour aller vers la rue de la Monnaie, on ne peut s’empêcher de remarquer la grande place Louise de Bettignies inaugurée en 1934, sept ans après la statue.
Anecdotes
- La dépouille de l'espionne est rapatriée à Lille en 1920 où une cérémonie solennelle est organisée pour lui remettre à titre posthume la croix de la Légion d'honneur, la Croix de guerre 1914-1918 avec palme et la médaille militaire anglaise. A cette occasion, elle est aussi faite officier de l'ordre de l'Empire britannique, fait rarissime pour une Française.
- D'ailleurs, les Anglais admiratifs du courage et des prouesses de Louise de Bettignies l'ont surnommée "the queen of spies" ("la reine des espions").
- La statue à l'entrée de Lille a été inaugurée le 13 novembre 1927 avec tous les honneurs par le maréchal Foch lui-même accompagné des généraux Weygand, Gouraud et Lacapelle ainsi que du ministre Louis Marin et de Roger Salengro, maire de Lille.
- Autour de Lille, de nombreuses écoles portent le nom de l'héroïne : à Lambersart, La Madeleine, Villeneuve d'Ascq et Faches-Thumesnil).
Article écrit en collaboration avec Virginie Pastoressa
Ci-dessus : le monument en l’honneur de Louise de Bettignies sur le boulevard Carnot, œuvre de Maxime Réal Del Sarte
Ci-dessous : souscription nationale à l’initiative de la maréchale Foch et la générale Weygand pour financer le monument
Ci-dessus : une foule immense pour célébrer Louise de Bettignies lors de l'inauguration de la place à son nom en 1934
Ci-dessous : de nombreuses villes autour de Lille rendent hommage à l'espionne, ici La Madeleine
La Poste a émis un timbre en l'honneur de Louise de Bettignies
Premier jour d'émission vendredi 28 septembre 2018, tirage à 500 000 exemplaires