Le Nouveau Siècle est aujourd’hui un lieu musical de référence à Lille pour son auditorium accueillant l’Orchestre National de Lille dans un écrin de 2000 places. Difficile de croire qu'avant son inauguration dans les années 1980, le Nouveau Siècle aurait pu ne jamais voir le jour puisque cette surface était destinée à un projet démesuré : le Diplodocus.
Le diplodocus est un projet imaginé dans les années 60 par un promoteur immobilier Robert Vandaele. L’idée est de construire un bâtiment immense comportant une galerie marchande, des bureaux, un cinéma, une brasserie… Le bâtiment devait être d’une surface de 80 000m2 répartis dans les 3 pales d’une hélice mesurant chacune 75 mètres de haut (voir maquette ci-dessous). Pour mener son projet, Robert Vandaele rachète tout au long des années 60 de nombreux bâtiments qui tombent en ruine dans le quartier des Poissonceaux. Le permis de construire lui est accordé le 3 novembre 1970 par le ministère de l'Equipement. Les travaux commencent en 1971 et une énorme cuve est creusée.
Une hélice géante au coeur du centre ville
Cependant ce projet n’est pas vu par tous d’un bon œil. Il est jugé gigantesque, non adapté à sa position en centre ville car proche d’habitations qui ne pourront plus voir le soleil. Des pétitions sont érigées, le projet est même dénoncé dans un magazine contestataire de l’époque “le Camplin libéré”. Les recours s’enchaînent entre le tribunal administratif et le Conseil d’Etat. Pendant ce temps le Robert Vandaele commence à crouler sous les dettes. Les travaux sont donc arrêtés et l’immense cratère - laissé à l’abandon pendant 3 ans - se remplit d’eau, à un tel point qu'il servira parfois de piscine officieuse (voir image ci-dessous). L'eau présente dans le trou béant provient d'émanations de la Deûle et rappelle - avec une certaine ironie - aux néo-Lillois que Lille à l'origine était une île.
Un renouveau baptisé Nouveau Siècle
Après avoir attendu les délais légaux constatant la carence officielle du promoteur, Pierre Mauroy décide en février 1976 de casser le permis de construire délivré par le ministère de l’Équipement et d'en accorder un nouveau. Le trou va pouvoir progressivement disparaitre à partir de 1977 car cette fois le projet est plus mesuré : un Palais des Congrès et de la musique d'une trentaine de mètres de hauteur... avec comme architecte le même que celui du projet du Diplodocus : Guillaume Gillet. Et c'est ainsi que le 18 juin 1983, l'Orchestre Nationale de Lille y donne un premier concert, mais il faudra attendre 1986 pour que le complexe soit officiellement baptisé "Le Nouveau Siècle" (du nom d'une des rues qui l'entoure). A ce jour, l'édifice contient des commerces, 150 logements sociaux, un parking de 940 places et un auditorium ultra-moderne de près de 2000 places inauguré en 2013. L'allure du Nouveau Siècle est impressionnante et particulièrement reconnaissable vue du ciel... puisqu'on retrouve la forme ronde de l'ancien cratère.
FR3 filme Lille le 1er août 1977... et met "à l'honneur" le trou du Diplodocus
Un souvenir gravé dans les mémoires
Le Diplodocus est resté dans les mémoires surtout pour son trou immense qui sera l'objet de querelles, de moqueries et d'une certaine admiration devant son immensité. Il sera surnommé le "trou de Mauroy" et aura même valu à Lille le surnom de "ville des trous". Enfin, il passera à la postérité en servant de scène extérieure au film Le Corps de mon ennemi sorti en 1976 où il représente les fondations de la boite de nuit Le Number One.
Le dessin du projet initial du Diplodocus
"Diplodocus, Centre d'affaires international" est bien le nom du projet... pas un surnom
Ci-dessus et ci-dessous, 3 vues aériennes montrant l'évolution du quartier : 1960, 1975 et 1981
Plan du quartier en 1820. Le chantier du Diplodocus sera "construit" au-dessus de la rue du Nouveau Siècle, entrainant la destruction de nombreuses maisons et rues.
Le chantier du Diplodocus... avant (ci-dessus) et après (ci-dessous) abandon
Ci-dessus et ci-dessous : le chantier du Diplodocus fait couler beaucoup d'encre et devient un enjeu politique pour les élections municipales entre Pierre Mauroy et Norbert Segard